Huggy-les-bons-tuyaux, l'atar de fer au mental d'acier !

Dimanche dernier, vers 21 heures, au prix de plus de 14 heures d'efforts intenses, Thierry nous a tous bluffé en réalisant un exploit unique sur la planète atarienne : celui d'arriver au bout de l'une des compétitions sportives les plus difficiles et les plus exigeantes au monde l' IRONMAN ULTRA XXL ! Notre reporter Zoueb s'est immédiatement dépêché auprès de Huggy (son vrai nom d'atar), équipé d'ustensiles à disséquer et bien déterminé à prélever des échantillons des matières rares et ferrugineuses dont son corps était à coup sûr constitué. Mais quelle ne fut pas sa suprise en découvrant que si l'acier et le fer étaient bien présents, ils se logeaient en réalité quelque part entre la détermination, la volonté et le courage. Mais il y avait autre chose. Un truc qui ressemble à de l'émotion.


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Z : Alors Huggy peux-tu nous dire ce qui t’a poussé à tenter cet exploit que l’on croyait impossible à moins d’être fait de métal et d’acier ? Tu as perdu un pari idiot ? Tu as commis un grave péché ? Et il te fallait l'expier ?

 

H : En fait tout est parti d’un défi entre copains ! Après avoir déjà fait un IRONMAN M puis L nous voulions simplement passer à la taille au-dessus : un XXL ultra !!!! Et nous avons choisi Vichy notamment pour la date car nous étions en vacances au mois d’août ce qui nous a permis de nous entraîner le dernier mois libérés de nos activités professionnelles.

 

Z : Ah tu me rassures, tu t’es quand même entraîné ?

 

H : Bien sûr, le XXL ne peut se faire sans un entraînement de 15 à 18 heures par semaine au minimum pendant 3 mois, en alternant les longues sorties à vélo, en course à pied et en natation en eau libre avec endurance. Et cela tout en respectant une bonne hygiène alimentaire et en faisant des tests de nutrition au cours des sorties vélo et course à pied, histoire de terminer l’épreuve sans trop de carences (vitamines, protéines, glucides etc..).

 

Z : Et quelle a été ta recette magique ?

 

H : J’ai appris à écouter mon corps car je me suis aperçu que dans le domaine de l’alimentation aucun conseil ne peut être universel. Personne ne digère de la même façon. Certains aliments correspondent mieux à certains organismes qu’à d’autres ...

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Z : Parle-nous un peu du parcours. Comment ça s’est passé et d’abord pourquoi Vichy alors qu’il y a pas mal d’autres IRONMAN organisés au mois d’août ?

 

H : Nous avons choisi Vichy pour son parcours vélo qui devait être plat !!! Hélas, cette année ils ont rajouté 1700 m de dénivelé positif !

 

Le jour de la course : réveil à 3h45 pour le petit déjeuner … que je n’ai pas pris car j’ai découvert que je digère très difficilement et très lentement ce qui m’handicape un peu pour la première épreuve c’est-à-dire la natation. 

 

A 5h du matin j’arrive sur le parc à vélo. Ouverture à 5h10. Préparation des vélos terminée j’enfile la combinaison de natation car nous apprenons que si la température de l’air ne dépasse pas pour le moment 16°, la température de l’eau est quant à elle de 22° ce qui est le seuil autorisé pour le port de combinaison. Ouf ! Car nager 3,8 kms en maillot de bain ça aurait été beaucoup plus difficile pour moi.

 

Nous prenons place sur le ponton à 6h30 et cherchons des yeux nos supporters parmi la foule. Premiers instants de chaleur et de réconfort ! Les départs sont lancés en Rolling Start par vagues successives de 6 athlètes toutes les 10 secondes. Je plonge dans l’Allier dont l’eau n’est pas froide mais saumâtre, une vague couleur marron qui ne donne pas envie d’en ingurgiter... mais quand on se retrouve coude à coude avec d’autres nageurs ou dans les pieds de celui de devant, boire la tasse devient inévitable.

 

Au bout d’une 1h 27 d’efforts humides, sortie de l’eau et première transition (T1). 



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Je prends le temps de me changer et d’enfiler une tri-fonction sèche. Direction le Bourbonnais pour un parcours de 180 kms de vélo qu’il faudra parcourir trois fois avec cette petite difficulté de 1700m de dénivelé total que nous n’avions pas prévu. Le parcours est vallonné avec des faux plat montant ou descendant. On traverse une bien belle région : ST YORRE, CUSSET, ISSERPENT, LE MAYET DE MONTAGNE ... Le tout sous un super soleil et une température qui peu à peu prendra des degrés pour atteindre les 34 à midi et demi.

C’est l’heure à laquelle j’atteins le kilomètre 120 du parcours vélo et le point de ravitaillement où m’attend mon bag nourriture perso que l’organisation autorise afin de nous permettre d’ingurgiter autre chose que des barres céréales et des gels ... ! Je décide donc de faire une halte et je me régale de ma salade de riz. Un grand bonheur !!

 

Kilomètre 180 ! Enfin ! Je quitte mon deux-roues sans regrets. La partie de mon corps qui me sert à m’asseoir est complètement engourdie et je me réjouis de quitter enfin cette selle sur laquelle j’étais vissé 7 heures durant !

 

Z : Ah comme je te comprends ! Je connais un certain Monsieur MALOKU qui voulait vendre son vélo pour moins que ça. Mais reprenons le fil de ce feuilleton haletant et ta deuxième transition avant le marathon. Rassures-moi et dis-moi que tu as fait une petite sieste pendant une heure ou deux ?

 

H : Pas vraiment non ! Mais lors de cette transition vélo / course à pied je vais quand même prendre le temps de décoller cette tri fonction qui me compresse le corps et que je ne peux plus supporter. A la place j’enfile des vêtements plus souples pour pouvoir effectuer mes 42 kilomètres de course à pied.

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Z : Un parcours plus urbain pour ce marathon final. Comment l’as-tu abordé ? Comment te sentais –tu ?

 

H : Oui nous devions traverser cette belle ville de Vichy en quatre boucles de 10 kms chacune. Grande joie tout d’abord que de me rendre compte, au bout de quelques kilomètres, que mes jambes n’étaient pas si engourdies que ça et que j’allais pouvoir me caler à la vitesse calculée à l’avance pour aller au bout de cette épreuve.

 

Sur les conseils de mon coach (que j’ai suivi très scrupuleusement), je m’arrête à chaque ravito pour boire et manger. Des bananes, des oranges, des Tuc … J’en fais un rituel ce qui me permet aussi de tenir mentalement et d’offrir à mon corps cette petite récompense de bien-être afin qu’il accepte de poursuivre un effort qui commence à être, je l’avoue, franchement dur.

 

Me voilà au kilomètre 30 et je viens donc de terminer la 3ème boucle. Il en reste encore une de 10 kilomètres. Je fais rapidement un état des lieux : je crois avoir perdu trois ongles de pieds, …

 

Z : Comme Maurice HERZOG quand il a gravi l’Annapurna …

 

H :  … je ne me sens pas en hypo et la joie de savoir qu’il ne me reste plus que 10 kms me pousserait même à accélérer pour terminer en dessous de la barre des 14 heures ... Je consulte une fois de plus ma montre,  je tourne à 145 pulsations minute. Je me sens épuisé mais capable de faire encore des efforts. Je choisis alors la sagesse d’accélérer juste un peu mais sans trop car c’est mon premier IRONMAN et je veux absolument arriver au bout sans incident.



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D’émotion, ma gorge se serre, mes yeux se remplissent de larmes, je n’avais pas imaginé que dans le costume d’homme de fer il y avait aussi toutes ces petites faiblesses. Il me reste 3 kms, je commence à ressentir la métaphore de fer, prendre possession du physique et du mental. Commence à retentir en moi des « ça y est, on y est, ça y est, tu l’as fait, ça y est, on y est ».

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Et puis d’un coup l’apothéose !!! Enfin cette moquette rouge sur laquelle je suis passé trois fois en sachant qu’à la quatrième j’irai sur la bifurcation qui veut dire stop ! Pour une fois les encouragements deviennent encore plus émouvants, plus pénétrants, plus touchants... Au microphone j’entends prononcer mon nom avant de passer sous l’arche et d’entendre, d’un coup, pour la première fois, au bout de cette longue épreuve : « Thierry You are an ironman ... » !



Z : Bon c’est malin ! Maintenant tu m’as mis les larmes aux yeux et j’ai la gorge noué alors qu’il me faut conclure cet interview. Alors je te laisse le mot de la fin car je crois que tu as un petit message personnel à l’attention des autres membres de la famille atarienne ?

 

H : Je voudrais dire merci à tous pour les petits messages que vous m’avez envoyés et qui m’ont aidé tout au long de cette épreuve et m’ont permis d’aller jusqu’au bout du bout. Merci pour toutes ces félicitations qui me sont allées droit au cœur. Je suis très fier et très content d’avoir accompli ce dépassement de soi. C’est vrai. Mais je reste heureusement le même ! Le plombier qui est dans un club formidable, qui a des amis formidables avec qui on partage toutes nos souffrances sportives et les émotions que le sport nous procure et qui font de nous, je le ressens, un être meilleur chaque jour. Je compte rester dans cette dynamique et cet esprit jusqu’au bout car notre sport sert avant tout à nous faire plaisir. Même si parfois il y a des fadas qui pendant leurs vacances se font le défi d’une cure thermale à Vichy !